Qu'est-ce que l'espace et la lumière? De tout temps, les artiste ont cherchés à créer des espaces cohérents en appréhendant la question du volume et de son éclairage dans un lieu donné. Le clair-obscur pour donner du relief, le sfumato pour créer de la profondeur, la rimlight pour faire ressortir un bord de visage... L'indomptable lumière est celle qui a su donner de la chair à un art qui était voué à rester à plat sur sa toile.

Depuis les années 60, les "environnements perceptuels" de James Turrell ne cessent de questionner les notions d'espace, de couleur, de lumière et de temps. L'artiste, aussi scientifique de formation, n'a commencé à expérimenter avec les projections lumineuses que dans les années 70. A cette époque-là, il créé ses premiers SkySpace, les installations in situ pour lesquelles il est grandement reconnu. Plus qu'une oeuvre d'art, Turrell préfère proposer des expériences sensorielles. Les Skyspace sont conçus pour accueillir une dizaine de personnes. Au plafond, parfois au mur, un trou permet d'observer le ciel comme dans un cadre, peu importe sa couleur. Juste un trou au plafond, du coup? Et bien, pas vraiment. Ces espaces de ciels sont construits de sorte à ce que la lumière englobe le spectateur, à ce qu'il puisse vraiment la percevoir. Sentir la lumière c'est aussi sentir varier l'espace d'une seconde à l'autre. Quaker de religion, l'artiste invite délibérément à la contemplation. Ses Skyspaces peuvent se trouver partout en Europe et aux Etats-Unis.

James Turrell a aussi travaillé la sensation d'espace avec de la lumière artificielle. Encore une fois, l'artiste se concentre donc sur la forme et sa matérialisation. Avec des projections, il arrive à créer un semblant d'objet solide, un cube de lumière pure, une pyramide brillante. Son oeuvre invite même le spectateur à parfois rentrer dans le cadre, dans un espace de lumière brut dont les limites ne sont plus visibles.
En réalite, James Turrell est un artiste de la perception. Si la lumière est son outil, c'est le spectateur qui lui donne vie par son regard. Mais pas comme devant un tableau: juste à travers les nombreuses sensations qui traversent son corps face à l'invisible enfin perceptible. Le temps n'est plus linéaire. L'infini est comme à portée de main.  

C'est beau, c'est vivant. James Turrell a su donner une âme à ses installations comme aucun artiste n'a su le faire jusque là. Ses différentes œuvres font preuve d'une démarche réfléchie, intelligente et d'une grande sensibilité. Au delà de la notion d'art, j'apprécie que Turrell appréhende la nature et l'architecture comme un tout harmonieux, et non comme deux éléments antinomiques. Dans ses œuvres, l'espace n'est pas une réalité, c'est une perception. Et chaque perception est une expérience différente. Selon moi, c'est plus qu'une démarche artistique, c'est un concept temporel et physique. De savoir qu'un seul petit carré de lumière peut tout changer, ne serait-ce que pendant quelques minutes, en ça, c'est déjà un exploit.
Turrell est une de ces rares personnes qui sait sculpter la lumière. Son oeuvre ne se limite pas à être exposée dans des musées, c'est un héritage vivant de centaines d'années d'études et de recherches artistiques sur la lumière. A mon humble avis, James Turrell est un artiste de talent qui a su dépasser les contraintes de l'outil et du cadre.

Il a aussi acheté un volcan pour faire une oeuvre géante. Si ça c'est pas du dévouement.

environnements perceptuels

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